Sans faire valoir son propre point de vue : la RD Congo s'est reposée, sur les analyses et les études réalisées par les bailleurs de fonds ( Mabi Mulumba en 2019)

Sans faire valoir son propre point de vue : la RD Congo s'est reposée, sur les analyses et les études réalisées par les bailleurs de fonds ( Mabi Mulumba en 2019)

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En 2019, lors de la rentrée économique à l'Université catholique du Congo ; le professeur  Mabi Mulumba exposait sur les perspectives économiques pour le développement en RDC. Faisant un état des lieux sur la politique économique du Gouvernement.  Il a indiqué que depuis 2002, la RD Congo a mis en œuvre un programme économique
comportant deux volets : des mesures d’assainissement budgétaire et monétaire devant stabiliser le cadre macroéconomique d’une part, et d’autre part, des
réformes structurelles devant relancer les investissements et la production.  Sans revenir au constat fait; Le professeur Mabi Mulumba parle des défis à relever par le pays dont quelques-uns restent d'actualité, pour son développement. lecorrespondant.cd vous replonge dans l'univers de sa pensée dont le  contenu est de 2019.  .   

 

2. Les défis que la RD Congo devrait relever

:
Pour s'engager sur la voie d’un développement auto-entretenue, la RD Congo devrait relever les défis ci-après :

2.1. La gouvernance et l'intériorisation du principe de redevabilité et une lutte effective contre la corruption

La RD Congo est affaiblie par l’institutionnalisation d’une gestion prédatrice de l’économie nationale, notamment dans la gestion des ressources naturelles, spécialement le bradage du patrimoine minier, forestier et pétrolier par les gestionnaires publics. Des sommes importantes provenant de la vente des actifs des entreprises publiques ne sont pas retracées dans les comptes de l’Etat. Cette situation a été portée à la connaissance de l’opinion nationale, suite à la médiatisation du différend opposant le FMI au gouvernement, au sujet des sommes perçues sur les ventes des actifs de la Gécamines dans une opacité totale.La crédibilité de la RD Congo a été entamée avec l’arrêt du Programme avec les institutions de Bretton Woods (PEG II). C’est l’occasion de rappeler un bradage ayant fait perdre à la RD Congo 1,36 milliards de dollars, à l’occasion de cinq transactions sur les gisements miniers de la Gécamine réalisées en moyenne au sixième de leur véritable valeur entre 2010 et 2014 .

2.2. La diversification économique par l'industrialisation et le développement de l’agriculture

 
2.2.1. L’industrialisation

 
Le fonctionnement du secteur industriel, en général, et minier en particulier, qui est le moteur de la croissance économique en RD Congo, est tributaire de
l’existence d’une fourniture fiable de l’électricité. La RD Congo est loin de répondre à cette exigence. Les deux centrales hydroélectriques d’Inga 1 et Inga 2 ont une capacité disponible représentant 50% de leur capacité installée de 1773 MW, suite à une maintenance insuffisante depuis leur construction. Le faible niveau d’accès à l’électricité est un important goulot d’étranglement au développement social et économique. La fiabilité de l’alimentation en énergie, pour ceux qui y ont accès, est notoirement faible et sujette à des fréquentes interruptions, avec une moyenne de 10 jours de panne d’électricité par mois.


Ces interruptions pénalisent gravement les entreprises privées qui assument, dans bien des cas, les coûts additionnels de génératrices de secours et également des coûts relatifs à la réparation des équipements endommagés par les surcharges. La mauvaise qualité de l’électricité attribuable à la piètre performance technique de la SNEL, affecte la compétitivité des entreprises locales et a un impact négatif notamment sur l’emploi.

investisseurs privés. Elle ne couvre pas ses frais d’exploitation par ses revenus et ses difficultés de recouvrement entraînent des problèmes de paiement considérables, des arriérés de paiement de ses fournisseurs et des taxes. L’amélioration de ces éléments est une étape pour attirer les investisseurs privés.


La situation de la fourniture de l’énergie électrique pourrait s’améliorer, s’il n’y avait pas une piètre gouvernance au niveau de la SNEL et bien entendu, au niveau de son ministère de tutelle, en ce qui concerne l’absorption des financements mis à la disposition de l’entreprise. Ce cas peut être illustré par deux exemples :


 Un projet relatif au Marché d'Électricité en Afrique Australe (SAPMP) dont un financement de 359,08 millions de dollars, mis en vigueur par la Banque


Mondiale en 2004 dont la date de clôture était prévue en décembre 2012, n’a été décaissé 8 ans après qu’au niveau de 36%.  Un autre financement de 579,7 millions de dollars pour le Marché d’Electricité à la Consommation Domestique et à l’Export (PMEDE) mis en vigueur en 2008 avec une date de clôture en juin 2016 n’a connu, 4 ans après,
qu’un décaissement de 11%.


L’industrialisation par la transformation, entre autres, en produits manufacturés de nos minerais qui sont jusqu’ici exportés sous forme brute avec comme gain l’accroissement de la valeur ajoutée au profit du pays est un objectif fixé au secteur minier dont l’article 105 du Code Minier révisé fait obligation au titulaire d’un permis minier d’exploitation d'effectuer le traitement des substances minérales sur le territoire national. La contrainte majeure relevée pour atteindre cet objectif, c’est notamment le déficit énergétique. Celui-ci s’élève à près de 1000 mégawatts au Katanga ; déficit qu'il faut préalablement évacuer, spécialement dans le secteur
minier.


La diversification économique exige dans tous les secteurs de production une suffisante disponibilité de l’énergie électrique qui permet l'industrialisation. C’est
en exportant des produits manufacturés que l’économie congolaise pourra connaître une résilience.

2.2.2. Les ressources naturelles

 

En ce qui concerne les ressources naturelles, l’enjeu premier pour maximiser leur potentiel est de connaître avec plus de précision les ressources que contiennent le sol et le sous-sol de la RD Congo. Selon une étude de la Banque Mondiale, les ressources minières « connues » demeurent des hypothèses et la RD Congo doit acquérir une plus grande maîtrise de son potentiel. C'est ainsi que les contrats miniers conclus ont résulté des accords signés aux conditions qui ne reflètent pas nécessairement la valeur marchande réelle du patrimoine minier. La minorisation de la valeur marchande des gisements s’explique également par le fait qu’en RD Congo, peu d'activités de recherche ont été menées à l’échelle nationale depuis l’indépendance. Le résultat en est que 90% du pays est inexploré et les 10% restants ont été explorés à l’aide de techniques et méthodes scientifiques rudimentaires,vieilles de 50 ans.

 

Invité à la Commission Économique du Sénat, lors du vote du Budget 2010, le Ministre des Hydrocarbures avait confirmé une certaine opacité en ce qui concerne
les recettes pétrolières revenant à l’Etat. Chose étonnante, le même Ministre avait relevé que la production pétrolière congolaise était restée constante au niveau de
25.000 barils par jour, pendant quarante ans, malgré l’augmentation du nombre de puits, passé de 100 à 300.


Pour ce qui est des réserves pétrolières, le Ministre avait affirmé qu’elles ne sont pas connues avec certitude et qu’il y avait lieu d’engager au minimum près de
50 millions de dollars pour déterminer le niveau de réserves pétrolières du pays et espérer ainsi tirer les ressources conséquentes dans ce secteur.

2.2.3. L’agriculture

 

Le pays doit intégrer à court terme dans ses stratégies de la relance de l’agriculture, la valorisation des spéculations agricoles où il a connu des performances dans le passé (production d’hévéa, d’arachide, de robusta, de thé, de palmier à huile). C’est pour éliminer la sous-utilisation des ressources naturelles et corollairement les ressources humaines en chômage déguisé et pour répondre aux besoins du marché en actionnant ce potentiel de production et de création d’emplois et d’amélioration des revenus pour un grand nombre (situé dans le monde agricole),  afin que les retombées de la croissance soient inclusives.


3. La promotion d’une classe moyenne congolaise


La Banque Mondiale révèle que le secret de la réussite des pays du Sud-Est asiatique connu sous le nom de miracle asiatique est dû à, entre autres facteurs :


- Un haut taux d’épargne et d’investissement ;

  • - Un taux de scolarité élevé et un niveau d'éducation de la force de travail en amélioration constante ;
  • - Un environnement macroéconomique relativement stable et une part  importante du commerce international ;- Une classe moyenne dynamique.

Si la RD Congo a connu un grand succès dans la stabilisation du cadre macroéconomique et que des efforts sont enregistrés dans le processus
d’accroissement de l’épargne avec des taux de croissance économique positifs, une politique volontariste de promotion d’une classe moyenne ne s’est pas encore
manifestée. Pour preuves :

 Il n’y a aucune présence d’un capital national dans le secteur bancaire et financier. Toutes les banques installées dans notre pays sont à capital étranger.
 Il n’y a aucune grande entreprise minière, industrielle ou agro industrielle aux mains des Congolais.

Cette lacune peut être comblée, avec l’aide du gouvernement. Il peut être envisagé :


 La création de deux ou trois banques par les hommes d’affaires congolais avec une majorité au capital ;
 L’insertion des Congolais au capital des entreprises de droit commercial issues de la transformation des entreprises publiques;
 La mise sur pied d’un Fonds de Garantie au profit des PME congolaises ;
 Le renforcement de la SOFIDE, pour en faire une banque de financement de l’agriculture ;
 La création d'une banque de financement de l’habitat ;
 Réussir la restructuration des entreprises du portefeuille de l’Etat ;
 Exploiter d’autres formes alternatives de financement et gestion des infrastructures avec le partenariat public-privé ;
 Création de façon permanente d’un environnement propice à la conduite des affaires reposant sur la sécurité juridique et judiciaire.

4. Sur le Plan institutionnel


Sur le plan institutionnel, depuis le démarrage du processus démocratique, la RD Congo a mis en place toutes les institutions à même d’assurer la bonne
gouvernance du pays. A côté de l’institution Président de la République, il y a le Parlement, le Pouvoir exécutif ainsi que le Pouvoir judiciaire.
La problématique à laquelle il faut trouver solution est celle de l’efficience de ces institutions. Le constat fait en pratique se situe au niveau du non-respect du
principe de redevabilité. La reddition des comptes est bâclée ; les rapports des organes de contrôle sont souvent non exploités ; les sanctions ne sont pas souvent
prises : d’où une situation récurrente d’impunité et de corruption devenue systémique.

En conclusion


La réussite d’un développement durable devra reposer sur une stabilité politique et une paix sociale. C’est ce qui doit constituer le socle de toute croissance
économique durable. L’accent devra être mis sur l’amélioration de la gouvernance ainsi que sur le renforcement de la capacité de négociation des contrats de partenariat et de la lutte contre la corruption et l’impunité. Par ailleurs, il est nécessaire de diversifier l’économie basée sur l’industrialisation et le développement du secteur agricole renforcée par la priorité portée sur les infrastructures de transport et énergétiques, sans oublier l’amélioration de l’éducation nationale. La résilience de l’économie nationale ne pourra provenir que de la diversification économique. Le tableau ci-après donnant la structure des exportations de la RD Congo conforte notre quête de la diversification économique. Cette structure repose donc sur quatre matières de base : le Cuivre, le Cobalt, l’Or et  totales de la RD Congo en 2017) dont les cours sont volatiles et menacent en permanencenon seulement la stabilité de la monnaie de la RD Congo, mais aussi la relance de l’économiedans son ensemble. Pour conclure cet exposé, Georges WOLF et Fabrice LUSINDE 5 interpellent notre pays en ces termes :
« La RD Congo s'est reposée, (dans la détermination de ses priorités) sur les analyses et les études réalisées par les bailleurs de fonds mais n'a pas forcément fait valoir son propre point de vue. La RD Congo doit avoir une vision de son propre développement qu'elle doit exprimer à travers un plan  besoins identifiés par les différents acteurs de la société congolaise ».

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